L’intelligence artificielle, c’est la révolution technologique dont tout le monde parle. L’IA et ses applications vont en effet profondément transformer de nombreux secteurs d’activité, dont la finance et la comptabilité. Dans cet article, nous allons tenter de comprendre comment fonctionnent les modèles d’IA et pourquoi ils vont changer la donne pour les équipes Finance.
Pourquoi parle-t-on autant d’IA aujourd’hui ?
Si l’intelligence artificielle fait les gros titres depuis peu, et plus particulièrement depuis l’arrivée de ChatGTP en France, cette technologie n’est pas apparue récemment.
“C’est une science qui remonte en réalité aux années 60. C’est la conjonction de trois facteurs qui a provoqué l’explosion que l’on connaît aujourd’hui : l’arrivée de nouveaux algorithmes très performants, la disponibilité de données en masse, et l’accès aux ressources matérielles nécessaires”, explique Vincent Bonnivard, chef d’équipe IA chez Probayes, entreprise spécialisée dans la conception de projets centrés autour de l’intelligence artificielle.
La montée en puissance de l’IA est ainsi indissociable de l’apparition des centres de stockage de données et de l’apparition de processeurs GPU performants (ceux que l’on retrouve sur les cartes graphiques des ordinateurs).
Ensemble, ils permettent de faire fonctionner des modèles d’intelligence artificielle aux performances très élevées.
Comment fonctionnent les modèles d’IA ?
Machine learning, IA generative ou encore deep learning, il existe plusieurs modèles d’IA. Toutefois, tous partagent certaines caractéristiques communes.
La force de l’IA : l’apprentissage automatique
Une IA, c’est avant tout un objet informatique entraîné à réaliser une tâche spécifique.
Cet objet va être entraîné sur une grande quantité d’exemples (d’où l’importance de disposer de données de qualité en quantité suffisante) et va ainsi apprendre à prédire le résultat d’une requête.
Tout l’intérêt de cette technologie, c’est qu’une fois entrainé, le modèle pourra être déployé n’importe où : sur un ordinateur, un téléphone, un objet connecté, etc.
Quelles différences entre l’IA et un moteur de règles ou un robot ?
Avant que les modèles d’intelligence artificielle ne soient largement disponibles, beaucoup d’outils informatiques avaient recours à une autre méthode : les moteurs de règles.
Il s’agit d’algorithmes qui fonctionnent selon des critères précis, définis à l’avance, mais qui ne sont pas capables d’apprendre par eux-mêmes.
“Les règles, c’est finalement assez difficile à mettre en place et ce n’est pas très fiable. Comme les RPA, des robots programmés pour automatiser une tâche précise selon un scénario établi, ce n’est pas réellement de l’IA”, précise Vincent Bonnivard.
L’IA en entreprise : quels usages pour la fonction Finance ?
Pour chacune des grandes missions de la fonction Finance, l’IA apporte déjà un certain nombre de solutions, alors que d'autres sont en cours de développement et pourraient arriver dans les mois ou les années à venir.
Voici plusieurs exemples :
La maîtrise des coûts
L’IA permet d’aller vers un meilleur contrôle des dépenses, notamment en fournissant déjà des outils pour :
- alerter le DAF ou le dirigeant en cas d’écarts par rapport à l’historique ou au prévisionnel ;
- catégoriser les dépenses ;
- élaborer des scénarios de gestion de trésorerie.
“L’une des applications à venir les plus attendues, c’est l’analyse intelligente du panel des fournisseurs, qui est l’un des casse-tête des directions financières ou des directions achat. Dans une grande entreprise, on trouve en moyenne 150 000 fournisseurs qu’il faut être capable de scorer, de catégoriser, etc. L’IA va être d’un grand secours pour cela, mais aussi pour améliorer le sourcing et pour faire des proposition d’achat en fonction de critères nombreux et dynamiques”, explique Marc Le Vernoy, fondateur de 3H18, société spécialisée dans l’externalisation des fonctions support (notamment dans les équipes Finance).
La collecte des créances
Mettre à jour constamment un tableau de notation du risque client ? C’est déjà dans les cordes des moteurs d’intelligence artificielle, tout comme la prise en compte des délais de paiement dans le prévisionnel de trésorerie.
“À terme, c'est tout le cycle de paiement qui sera automatisé grâce à l’IA”, explique Marc Le Vernoy.
D’importants gains de productivité sont à portée de main, à condition toutefois d’être capable d'entraîner les modèles correctement.
"Là encore, on en revient à l’importance de la data. Si on veut pouvoir détecter un client à risque, il faut disposer d’un historique d’un données sur ce type de client, pour que le modèle puisse s'entraîner et reconnaître demain des profils particuliers”, précise Vincent Bonnivard.
L’optimisation des délais de clôture
Alors que les équipes Finance sont de plus en plus pressées de clôturer leurs comptes, l’IA va leur permettre de gagner un temps précieux en favorisant l'automatisation de la tenue comptable.
“La saisie va être considérablement accélérée. Elle profite déjà de la reconnaissance automatique de caractères (OCR) pour la lecture automatique des pièces, mais jusqu’à aujourd’hui, elle était basée sur des moteurs de règles. L’IA va faire entrer l’OCR dans une nouvelle dimension, et c’est d’ailleurs l’un des sujets sur lesquels travaillent les équipes IA chez Regate by Qonto. Notre plateforme propose aussi le rapprochement bancaire intelligent. C’est l’IA qui va proposer les écritures comptables correspondantes, avec un taux de réussite très élevé”, explique Laura Pallier, cofondatrice de Regate by Qonto.
Et demain, l’IA facilitera encore plus la clôture en facilitant le suivi des approbations (et en corrigeant les erreurs de routage en la matière).
Le reporting en temps réel
Aujourd'hui, 48% des décideurs financiers considèrent que le reporting va devenir la première application de l'intelligence artificielle (étude OneStrem 2022).
“C’est vrai que, dans le domaine, l’utilisation de l’IA peut donner des résultats spectaculaires. Vous pouvez par exemple prendre des états financiers, les mettre dans un modèle d’IA générative et lui demander de vous faire des commentaires financiers sur les éléments analysés. L’IA va vous faire un rapport comme si vous aviez un contrôleur de gestion à côté de vous.”, raconte Laura Pallier.
Ces usages sont déjà disponibles et fonctionnent avec plus ou moins de pertinence.
“Il faut toujours garder un oeil critique, et encore un fois bien entraîner les modèles avec des données de qualité. Mais l’IA peut apporter une réelle utilité, notamment sur des sujets comme la préparation et le suivi des rapports extra-financiers.”
Le contrôle interne et la gestion des risques
Voilà déjà plusieurs années que l’IA est utilisée pour lutter contre la fraude, notamment dans les grandes banques. En entreprise, elle peut aussi servir à détecter les fraudeurs, par exemple en identifiant les tentatives de double paiement de fournisseurs.
“Bientôt, on pourra aussi utiliser des outils IA pour analyser des contrats et y détecter les problèmes de conformité. Les modèles pourront en effet être entraînés sur des bases regroupant les contrats existants, la jurisprudence, les textes réglementaires, etc.”, souligne Marc Le Vernoy.
Face aux capacités de l’intelligence artificielle, et notamment des modèles génératifs, beaucoup d’usages restent encore à inventer pour les directions financières. Le potentiel est énorme, à condition de s’assurer de la disponibilité de la data, et de sa sécurité.